Sur la nécessité de la bonne foi du lanceur d’alertes
CEDH- Droit pénal - bonne foi - lanceur d’alertes
Dans un arrêt en date du 21 juin 2016, la Cour européenne des droits de l’homme a décidé que des déclarations faites par un salarié sur des détournements de fonds publics, dénoncées sur le fondement d’une rumeur non-vérifiée, caractérise de ce fait l’absence de bonne foi et conclu à la non-violation de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, sur la condamnation pour diffamation aggravée dudit salarié.
En l’espèce, M. Soares, ressortissant portugais, était caporal-chef de la garde républicaine et à ce titre, a envoyé un courrier à l’inspection générale de l’administration interne, affirmant que le commandant du poste territorial avait détourné des fonds publics. Par ailleurs, ses allégations étaient fondées sur des rumeurs.
Des enquêtes ont dès lors été menées et n’ont permis d’établir ni la véridicité des propos de M. Soares, ni la commission d’un quelconque acte délictueux par le commandant.
En conséquence, M.Soares fut condamné par les juridictions internes portugaises, aux motifs que ses déclarations énoncées dans son courrier litigieux ont porté atteinte à l’honnêteté, à l’honneur ainsi qu’à la réputation du commandant.
En effet, face à l’impossibilité d’établir la véracité des propos de M.Soares, les juridictions pénales portugaises ont conclu à l’absence de bonne foi de ce dernier.
M. Soares a alors saisi la Cour européenne des droits de l’homme en invoquant la violation de son droit à la liberté d’expression sur le fondement de l’article 10 de la Convention.
La Cour européenne a statué dans le même sens que les juridictions internes portugaises, en effet, la Cour européenne a considéré comme établi la condamnation du requérant pour diffamation aggravée aux motifs que le requérant n’a pas respecté son devoir de loyauté, de réserve, ainsi que de discrétion lui incombant en tant que salarié. De plus, ce dernier ne s’était fondé que sur une simple rumeur, impossible à vérifier par ses autorités hiérarchiques.
Par conséquent, la protection particulière en matière de dénonciations sur le fondement de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme n’est pas justifiée en l’espèce.
Cet arrêt nous apporte un éclaircissement sur les modalités dans lesquelles les lanceurs d’alertes peuvent bénéficier d’une protection particulière de l’article 10 de la Convention européenne, à condition, toutefois, de respecter le principe de bonne foi.
CEDH 21 juin 2016, Soares c/ Portugal, req n°79972/12
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